Guingamor
va vers elle, lui apporte et lui tend ses vêtements; il
la remercie de son offre et lui dit qu'il ne peut pas accepter
son hospitalité, car il a perdu son sanglier ainsi que
son chien qui le poursuivait.
- Ami, répond
la demoiselle, personne au monde ne pourrait le trouver sans
mon aide, quels que soient ses efforts. Abandonnez votre folle
entreprise, venez avec moi et je vous promets loyalement que,
d'ici trois jours, je vous livrerai le sanglier et je vous
donnerai le chien à emporter dans votre pays. je m'y
engage.
- Belle, dit le chevalier,
alors je logerai volontiers chez vous aux conditions que vous
dites.
Il s'arrête et
descend de cheval. La pucelle s'habille aussitôt et
celle qui était avec elle lui amène une mule
richement harnachée, bien sellée, avec pour
ellemême un palefroi comme n'en eut de meilleur ni comte
ni roi. Guingamor suit la pucelle; après l'avoir soulevée
pour la mettre en selle, il monte à cheval et prend
les rênes. Il la regarde plusieurs fois, la joie au
coeur, la trouve belle, élancée, séduisante,
et souhaite qu'elle l'aime et devienne son amie.
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Il fixe sur elle de doux regards et la prie de lui accorder
son amour : jamais il n'avait eu le coeur troublé pour
une femme, ni n'avait songé à l'amour. Elle était
sage et bien éduquée. Elle répond à
Guingamor qu'elle l'aimera volontiers, ce qui emplit de joie
le chevalier. Assuré de son amour, il l'étreint
et l'embrasse. Prenant les devants, la suivante arrive en piquant
de deux au palais où avait été Guingamor
et le fait somptueusement décorer. Elle fait monter les
chevaliers et les envoie à la rencontre de leur dame
en l'honneur de l'ami qu'elle amène. Il y en avait trois
cents ou plus, tous vêtus d'un bliaut de soie brodée
d'or. Chacun d'eux amenait son amie : c'était une belle
compagnie. Il y avait des jeunes gens portant des éperviers,
de beaux autours fauves et mués, et autant dans le palais
qui jouaient au trictrac et aux échecs.
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Suite
-Source : Lais féeriques
des XIIèmes et XIIIèmes siècles, ed. Flammarion.
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